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Quelques précisions au sujet de MICROMALTHUS (Insecta Coleoptera)
J.Barlet.
Some precise details about MICROMALTHUS (Insecta Coleoptera)

RESUME

Le prothorax de Micromalthus est très different de celui des autres Coléoptères. Son ptérothorax est tout à fait semblable à celui des Lymexylonides près desquels doit être classée la famille des Micromalthides.

SUMMARY

The prothorax of Micromalthus is very different of those of the other Coleoptera. Its quite similar to that of the Lymexylonidae near wich the family Micromalthidae must be classified.

Mots-clés : Coléoptère –Thorax

INTRODUCTION

Micromalthus, Coléoptère de classement difficile : tel est le titre d’une note de F.Carpentier (1952)En effet, ce Microcoléoptère bien connu pour ses phases larvaires déroutantes (voir exposé dans Jeannel et Paulian, Traité de Zoologie, T.IX, 893-895) présente des caractères morphologiques qui évoquent tantôt des Adéphages, tantôt des Polyphages si bien qu’il a été classé par certains auteurs avec les Cupédides dans le sous-ordre des Archostemates et par d’autres au voisinage des Lymexylonides dans les Polyphages.

Disposant d’une des phases larvaires dite de type caraboïde, Carpentier a pu déterminer que les pattes sont de caractère adéphagien, ce qui n’a cependant pas amené l’auteur à placer Micromalthus dans un sous-ordre plutôt que dans un autre.

L’éminent spécialiste des Coléoptères CROWSON écrit (1955,p86) que la famille des Micromalthides est à classer certainement dans les Archostemates mais en 1944 (p.275), il avait remarqué la grande ressemblance entre le métathorax de Micromalthus et celui du Lymexylonide Hylecoetus.

Devant ces indécisions, j’ai entrepris d’étudier et de figurer le thorax de Micromalthus qui à ma connaissance, m’a paru fort négligé jusqu’à présent.

MATERIEL

J’ai eu de la chance de pouvoir obtenir deux imagos de cette espèce (je remercie vivement la Smithsonian Instiution pour ce don précieux) et de disposer de l’importante collection de préparation du thorax des Insectes constituée par CARPENTIER et moi-même, ce qui m’a permis d’utiles comparaisons surtout avec les Lymexylonides (Atractocerus Hylecoetus, Lymexylon). Les deux exemplaires de Micromalthus ont été disséqués et montés en préparation à l’euparal. Leurs dessins ont été obtenus par projection avec l’appareil d’Edinger.

OBSERVATIONS

Si l’on compare la fig1. de Micromalthus à la fig.2 d’Atractocerus il apparaît immédiatement que ces deux Coléoptères sont bien proches : même silhouette, mêmes proportions relatives des trois segments et surtout l’exceptionnel allongement du métathorax.
Dans ce segment, l’apodème pleural « ap » offre dans les deux espèces la même longueur relative par rapport à la longueur totale du thorax. Dans d’autres Lymexylonides le métathorax est également très allongé. Dans ces espèces et chez Micromalthus, les coxae sont situés tout à l’arrière dans les trois segments thoraciques. Signalons au passage que le thorax d’Hylecoetus ets très sclérifié alors qu’à part le notum, et partiellement le prothorax, le thorax d’Atractocerus et de Micromalthus est fort membraneux.

Pour plusieurs auteurs, le prothorax est un segment qui présente beaucoup d’intérêt. Son étude comparative dans tous les groupes d’Insectes pourrait amener à une certaine compréhension de l’évolution de cette classe. Dans un même ordre sa structure permet d’établir des relations entre familles. Envisageant ce genre de question on peut citer, après le travail de base de CARPENTIER (1929), ceux de LARSEN (1966), de HLAVAC (1972,1975) de EVANS (1973) et de BAEHR (1976, 1979).

L’étude du prothorax dans de petites familles de minuscules Coléoptères classés dans le groupe provisoire des Myxophaga (BARLET 1972) et dans les Torridincolides (BARLET 1974), m’a permis de reconnaître l’appartenance de certaines de leurs espèces soit aux Adéphages soit aux Polyphages .

Venons-en au prothorax de Micromalthus. A ma connaissance sa seule représentation est celle donnée par HLAVAC (1975, fig.5) : il s’agit d’une vue externe (ma fig.3) peu compréhensible. Elle est très différente de la vue interne donnée ici (fig.1).

Dans son texte HLAVAC (p140) signale que notum, pleuron, trochantin et sternum sont fusionnés et qu’il n’y a aucune trace de suture. A première vue cela semble vrai. Cependant, dans une de mes préparations microscopiques, je distingue de très fins replis qui pourraient indiquer la limite entre pleuron et sternum. Dans une autre préparation d’un individu probablement plus sclérifié, je vois une ligne horizontale qui pourrait être la limite entre pleuron et notum : ces deux détails sont reportés dans les fig.1 et 4. Ce prothorax de Micromalthus est également remarquable par d’autres particularités. Comme son ptérothorax est tout à fait semblable à celui des Lymexylonides, on pourrait s’attendre à ce que son prothorax soit également semblable à celui des espèces de cette famille.
La comparaison entre les fig.1 et 2 montre qu’il n’en est rien. Le prothorax de Micromalthus comporte deux parties successives ? La première, la plus étendue, est fort sclérifiée : elle est constituée de régions apparemment plus ou moins fusionnées appartenant au sternum, au pleuron et au notum. Elle est bordée postérieurement par un apodème « ad » sur une pointe duquel s’articule la coxa. Celle-ci est située dans la partie postérieure très membraneuse du segment qui se termine par une boursoufflure évaginée contenant le premier stigmate qui est postsegmentaire (pour ce terme voir BARLET et CARPENTIER, 1962).

L’apodème « ad » est-il homologue à un apodème pleural séparant une région épisternale et une épimérale ? si son articulation avec la coxa y fait penser, son obliquité vers l’arrière jusqu’à l’extrémité postérieure du notum ne permet pas, nous semble-t-il, d’admettre cette homologation. A ma connaissance, un apodème pleural incliné vers l’arrière n’est visible que dans le ptérothorax des Odonates dans un pleuron incliné lui aussi vers l’arrière (voir p.ex. MATSUDA, 1970, fig .171 A.).

Ce prothorax de Micromalthus est aussi remarquable par une autre particularité de sa structure : si les deux segments suivants évoquent nettement les Lymexylonides , des Polyphages donc, le prothorax est dépourvu de la cryptopleure lamellaire ou tubulaire que, jusqu’à présent, on a trouvée chez tous les Polyphages chez lesquels elle est articulée sur un trochantin bien individualisé. On aurait pu s’attendre à la présence chez Micromalthus d’une cryptopleure lamellaire comme celle d’Atractocerus (fig.2) qui est assez semblable à celle de différents Staphylinides, de Silphides, de Chauliognatus, de Lycus, etc. Une représentation détaillée de cette cryptopleure, en vue externe est visible dans la publication de BAEHR (1976).

Contrairement à ce qu’on observe chez les Cupédides, les Adéphages et les Polyphages il n’y a pas de trochantin individualisé au prothorax de Micromalthus ni d’ailleurs au deux segments suivants. A ce propos, il me semble bon de rappeler qu’à plusieurs reprises F.CARPENTIER et moi-même avons insisté sur le fait que ce sclérite est originaire de la partie antérieure du cadre coxal. Lorsqu’il n’est pas visible, c’est qu’il ne s’en est pas détaché (ceci parait admis par KRISTENSEN (1995,p.92, note 5)

L’importante région pleurale sclérifiée du prothorax de Micromalthus pourrait faire penser au pleuron, d’origine catapleurale, des Cupénides et des Adéphages s’il y avait une suture noto-pleurale horizontale avec une invagination en coupole plus ou moins allongée d’origine probablement anapleurale. Il est vrai que cette invagination est fort réduite chez certains Adéphages (Cicindèle) ou même absente en laissant à peine une trace de la suture (Agra du Brésil). Les attaches supérieures des rares muscles dorso-ventraux (fig.4) actionnant la patte de Micromalthus ne permettent pas de situer avec précision la limite entre pleuron et notum. Elle pourrait cependant se trouver sous ces attaches (ligne pointillée) car les muscles 2,3 et 4 sont nettement coxo-notaux.

Le muscle n°1 me parait exceptionnel. C’est un trochantéro-notal visiblement du secteur épisternal. Or, après avoir consulté un maximum de travaux relatifs à la musculature thoracique des Insectes (BARLET, 1979), je n’ai trouvé de trochantéro-notal au prothorax des Holométaboles que chez les Diptères (p.96) et il est épiméral comme celui qui peut exister au prothorax de certains Hémimétaboles : parmi ceux-ci on peut cependant trouver un trochantéro-notal épisternal chez les Thrips et les Embioptères (p.98) Le trochantéro-notal n°1 de Micromalthus serait dont jusqu’à présent le seul prothoracique épisternal découvert chez un Holométabole.

Pour terminer, examinons les endosternistes. Chez les Ptérygotes, ils sont de deux types : les spinas impaires des régions intersegmentaires et les furcas ou apophyses sternales. Les spinas sont absentes chez Micromalthus bien qu’à première vue le métendosternite pourrait y faire penser : en fait, chez les Ptérygotes, la présence d’une spina à l’arrière du métathorax est rarissime. L’exception la plus connue est celle offerte par Gryllblatta (WALKER 1938). Les furcas, à l’origine, consistent en une paire d’invaginations par segment : chaque invagination surgit à la limite entre le sternum et la partie proximale, ou latérosternite, de l’anneau catapleural. Dans beaucoup d’espèces d’insectes, les deux apophyses sternales sont fusionnées en un pilier supportant deux branches, d’où l’aspect de fourche. Chez Micromalthus les apophyses sternales sont séparées au prothorax et au mésothorax. Au méta thorax elles sont fusionnées en une fourche dont le milieu supporte deux fins tendons parallèles au sternum : cette structure est représentée avec tous ses détails par CROWSON (1994, planche 1, fig.5) Cet auteur trouve (p.275) que par sa forme générale ce métendosternite dans une large section des Polyphages (1944, p. 308) . La localisation tout à fait postérieure des furcas et l’absence de divisions dans le sternum équivaut au basisternum. Seul un petit sclérite transversal « fs » dans le métathorax, qui porte le métendsternite, pourrait être considéré comme un furcisternite.

CONCLUSION

Plusieurs auteurs ont relevé chez Micromalthus quelques caractéristiques d’Adéphage, notamment dans les ailes. Nous pouvons y ajouter une autre : l’absence totale au prothorax d’une cryptopleure comme celle que possèdent les Polyphages. Cependant ce prothorax n’est pas celui d’un Adéphage : il lui manque, même sous forme de trace, la suture notopleurale avec invagination en coupole. Il est aussi moins riche en muscles que les prothorax étudiés par BAEHR (1979). Le ptérothorax me parait être aussi important dans la recherche des affinités entre familles : le ptérothorax de Micromalthus si semblable à celui de Lymexylon et d’Atractocerus apporte un argument supplémentaire justifiant le placement de la famille des Micromalthides au voisinage immédiat des Lymexylonides comme l’on fait JEANNEL et PAULIAN.