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Un curieux genre de Collemboles

J.BARLET

De mousses enlevées à de grosses pierres le long du Ninglinspo (Nonceveux) en novembre 1949 et placées dans un appareil de BERLESE simplifié, j'ai eu la chance d'obtenir seize exemplaires d'une des plus curieuses formes de Collemboles existant en notre Pays : Megalothorax minimus WILLEM.

Découverte en 1900 dans un terreau humide, au jardin botanique de Gand, et devenue aussitôt le type d'un genre nouveau, cette espèce semble neplus avoir été observée ultérieurement en notre pays ; elle n'a été signalée de France qu'à partir de 1931. Un petit nombre d'autres représentants du même genre ont été découverts par après en des endroits fort éloignés du globe, notamment en Australie et en Nouvelle Zélande.

Les Megalothorax ne sont rares qu'en raison vraisemblablement de la difficulté de les découvrir. Ce sont des sauteurs émérites et leur taille est extrêmement réduite, la longueur de notre espèce atteignant 0,25mm environ, correspondant à peu près à celle d'une Paramécie, un Infusoire. Le record de taille dans le genre Megalothorax est, à ma connaissance, détenu par M.novae-zealandiae SALMON avec une longueur de 0,4mm.

Des recherches nouvelles et approfondies sur ces bestioles seraient souhaitables eu égard aux indications qu'on pourrait y trouver du point de vue tant de la systématique générale et de la phylogénie des Collemboles qu'à celui de la morphologie comparée.

Le genre Megalothorax a été rangé dans le sous-ordre des Symphypleona dont un genre particulièrement représentatif est Sminthurus. celui-ci est caractérisé par une forme globuleuse, un abdomen relativement énorme, sans segmentation apparente, et enfin, par la petitesse du thorax. Or, les Megalothorax - comme leur nom l'indique - se font précisément remarquer par la dimension relativement considérable du thorax, celui-ci ne présentant qu'à peine la réduction, si fréquente chez les Collemboles, du premier segment et une certiane hypertrophie du dernier. L'abdomen, par rapport aux autres régions du corps est minuscule.

Ce dernier caractère semble en relation avec un arrêt précoce de la croissance postembryonnaire. d'après les observations d'AGELL (Studies on the postembryonic Development of collemboles, Archiv för Zoologi, XLI, 1949, pp.1-35) cette croissance s'arrête alors que la taille n'atteint pas au double de ce qu'elle est à l'éclosion. L'organisme est dès lors sexué. L'organisation de l'appareil reproducteur, étudiée tout au moins chez le mâle par WILLEM reste d'ailleurs plus simple que chez les autres Collemboles.

La paire de stigmates antérieurs au prothorax et les trachées que possèdent divers Sminthurides (et Aclaletes) n'apparaissent pas.

Il est intéressant que, dans les conditions où s'effectue la croissance, l'organisme reproduise plusieurs caractères particulièrement primitifs pour un Collembole. Sa tête énorme et dépourvue d'yeux reste presque aussi catacérate que celle d'une Podura. Elle porte également des antennes de quatre articles fort semblables à celles caractérisant ce dernier genre. Le prothorax n'est guère réduit. L'ampleur acquise par le métathorax était peut-être exigée du fait que l'abdomen n'offre plus, pour le développement des gonades, qu'un espace réduit. Les pattes ressemblent à celles de Podura mais la hanche est plus longue ; les articles précoxaux sont particulièrement distincts. L'abdomen, en dépit de sa brièveté, est, à l'extérieur, nettement segmenté.

A côté de ces caractères plus ou moins archaïques, il en existe évidemment de coenogénétiques. Au nombre de ces derniers, WILLEM a placé les curieuses costrictions du tube digestif ; il vaudrait cependant la peine d'en rechercher l'origine exacte.